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Le blog de Bruno LACHNITT

25ème ordinaire année B : Sg 2, 12.17-20 ; Jc 3, 16 – 4, 3 ; Mc 9, 30-37

19 Septembre 2015 , Rédigé par Bruno LACHNITT Publié dans #Homélies

Dans l'évangile de ce dimanche, Jésus annonce à ses disciples qu'il va être livré aux mains des hommes, être tué et le troisième jour ressusciter. "Mais les disciples ne comprenaient pas ces paroles et ils avaient peur de l’interroger." Et c'est peut-être là que nous en sommes, nous aussi : nous ne comprenons pas la mort de Jésus. Au moins, n'ayons pas peur d'interroger les textes que l'Église nous donne aujourd'hui pour essayer d'avancer. Et je voudrais d'abord revenir sur la première lecture du livre de la sagesse. Il n'est pas inutile pour comprendre un texte, d'aller regarder d'où il est sorti. Nous sommes ici dans le discours de l'impie, c'est à dire celui qui ne craint pas Dieu. Mais pour comprendre qui est celui qui ne craint pas Dieu, les deux versets qui précédent le passage que nous avons entendu sont ici utiles et je regrette qu'ils n'aient pas été retenus par la liturgie. Que dit l'impie juste avant le passage que nous avons entendu ? "Écrasons le pauvre et sa justice, soyons sans ménagement pour la veuve, et sans égard pour le vieillard aux cheveux blancs. Que notre force soit la norme de la justice, car ce qui est faible s’avère inutile". L'impie est celui qui méprise le faible et impose sa force en guise de justice, celui pour lequel il n'y a d'autre loi que son pouvoir sur les autres. Peut-être pouvons-nous mettre des mots plus actuels sur ce personnage, sans doute ici même pouvons-nous parfois entendre ce discours avec d'autres mots peut être mais qui disent bien la même chose : "Que notre force soit la norme de la justice, car ce qui est faible s’avère inutile".

Mais nous-mêmes aussi sommes peut-être comme les disciples qui n'ont tellement rien compris à ce que leur enseigne Jésus, que juste après cette annonce qu'il va être livré aux mains des hommes et être tué, ils discutent, voire se disputent, pour savoir lequel d'entre eux est le plus grand. Et là, le texte de Jacques entendu avant la demande de pardon nous éclaire. "Bien-aimés, écrit-il, la jalousie et les rivalités mènent au désordre et à toutes sortes d’actions malfaisantes". La jalousie, cette tendance redoutable à se comparer, à considérer mes envies plutôt que mes besoins et à déterminer ces envies en fonction de ce que l'autre a. Toute notre société de consommation est basée sur ce désir d'être ou d'avoir comme l'autre. La jalousie est devenue le moteur de l'économie et c'est peut-être pour cela que nous allons dans le mur. Gandhi disait qu'il y a suffisamment de richesses sur terre pour répondre aux besoins de tous, mais pas assez pour satisfaire la convoitise de chacun.

La jalousie traverse la Bible, depuis le récit de la chute dans le livre de la Genèse où le serpent sème un soupçon de jalousie dans le coeur de l'homme. Quand Eve lui dit :"nous pouvons manger de tous les arbres du jardin, mais celui qui est au milieu du jardin Dieu a dit "vous n'en mangerez pas, sinon vous mourrez", le serpent insinue la jalousie comme un soupçon : "Pas du tout, vous ne mourrez pas, mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vous serez comme des dieux". Soupçon que Dieu veut garder jalousement pour lui ce qui serait accessible à l'homme. Quand la relation à Dieu n'est plus la confiance, la relation au frère est dominée par la jalousie. C'est Caïn face à son frère Abel et la jalousie sème la mort.

Alors Jésus invite ses disciples à un retournement qui peut nous choquer : « Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous. » Et lui-même donne l'exemple en étant livré aux mains des hommes, en acceptant d'être victime pour notre salut, pour ouvrir un chemin qui casse le cercle infernal de la jalousie qui empoisonne nos relations à Dieu et entre nous. En prenant la dernière place Dieu manifeste qu'il ne retient rien par jalousie, qu'il se donne lui-même, que c'est sa vie qu'il veut nous donner en plénitude. C'est ce que dit Paul quand il écrit aux Philippiens : "Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. Reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix."

Être une victime en prison, c'est très négatif. Même à l'EPM, chez les mineurs, quand j'entends parfois un détenu me dire d'un autre "c'est une victime" je ne peux m'empêcher d'entendre en écho les versets du livre de la sagesse : "Que notre force soit la norme de la justice, car ce qui est faible s’avère inutile". Il y a donc quelque chose qui nous heurte profondément, qui nous prend à rebrousse-poil dans ce chemin qu'ouvre Jésus et où il nous invite à le suivre : prendre la dernière place pour se mettre au service de celui qui est faible. Pour cela il faut désamorcer la jalousie qui empoisonne nos vies, et le seul moyen de se débarrasser de la jalousie c'est une relation de confiance vis à vis de Dieu. Et cette confiance est possible parce qu'en Jésus il nous a prouvé qu'il était prêt à tout pour se donner à nous. Si Jésus a consenti à être victime pour nous libérer du péché, il n'a pas été victime malgré lui : "ma vie, dit-il, nul ne la prend, mais c'est moi qui la donne". Quand quelqu'un donne sa vie pour nous, cela fonde la confiance que nous pouvons mettre en lui.

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